Après avoir pratiqué le fusain et le modelage, j’ai commencé la sculpture en 2009. Je suis une sculptrice plutôt engagée, j’exprime les inégalités, l’indifférence, la colère, la violence de l’Être, mais aussi la joie, la paix, l’espoir, l’amour. La création est l’existence de soi, elle nourrit mon âme, mon cœur, mon corps. À travers elle, je me remplis, je me vide d’émotions contradictoires.
La vie, le monde sont mes ressources majeures, elles se transforment en moi pour se réaliser dans la matière. Le choix de la sculpture me permet de créer en rythme avec la matière. Trouver le fil du bois pour mieux l’accompagner, réagir au tap musical sur la pierre, au flop du plâtre, au cri du diamant sur le marbre, afin de les apprivoiser pour que naisse ma réalité.
Choisir la matière, se débattre avec elle pour en extraire une figure, un corps, un symbole… J’aime le son variable, fort, énergique, lent, lourd parfois agaçant mais qui finalement, caressera la pierre en fin de course pour faire émerger tout ce qu’elle a de plus beau à offrir.
J’aime travailler le bois et être surprise par son odeur, ou bien la pierre de la plus belle à la moins parfaite, elle m’anime de toute son énergie et de sa beauté.
Il est parfois nécessaire d’accepter l’imperfection de la matière, voire de la mettre en valeur car elle peut refléter celle de l’Être à travers l’œuvre. Le son de chaque coup sur la pierre m’éveille dans un nouveau sommeil, je n’en finis pas de m’ouvrir les yeux, tout en restant fidèle à moi-même, en me distinguant au risque de déplaire, et en luttant contre les mythes de la liberté. Une œuvre peut mettre à l’épreuve la conscience qui la regarde, mais aussi la transporter
dans l’émerveillement. Dans la création l’acte finit par m’échapper, il devient inconscient malgré la
conscience de l’accomplir.
J’aime travailler avec des matières différentes comme le bois, les calcaires, le marbre, la stéatite, le plâtre, l’albâtre, le verre, l’acier. Je travaille beaucoup la pierre qui pour moi est le matériel avec le bois, le plus vivant, elle respire. Ses imperfections révèlent aussi les nôtres (morale et physique). Il est important pour moi que l’œuvre ne soit pas esthétiquement « parfaite » pour nous rappeler que l’Être ne l’est pas et accepter l’Autre et soi avec bienveillance.